Dans son discours d’ouverture du synode, le pape François a donné des indications aux participants sur le déroulement de cette assemblée et les a renvoyés à des textes de saint Basile sur l’Esprit Saint. Il a entre autre déclaré que l’Église était « en pause », tout comme l’étaient les apôtres rassemblés dans la chambre haute avant la Pentecôte. Ces derniers cependant se cachaient de peur, tandis que « nous ne le sommes pas ». Le Synode, c’est l’Eglise en pause qui écoute et il a jouté que l’Esprit Saint est harmonie et que s’il n’y a pas d’harmonie, c’est qu’il n’y a pas d’Esprit Saint. 

Un Synode atypique de par le lieu, la disposition des 364 participants mais encore de par l’utilisation de nouvelles technologies de communication. 

Monseigneur Bruno Forte, participant à cette assemblée synodale a rappelé quelques aspects fondamentaux qui ont caractérisé l’expérience :

« (…) Tout d’abord, le Synode a été un temps de fraternité, qui a uni dans la foi et dans la joie de l’amour reçu et donné des femmes et des hommes très différents les uns des autres, unis par la rencontre qui a marqué leur vie, celle avec le Seigneur Jésus dans son Église. Aussi surprenant que cela puisse paraître, des personnes d’âges et de cultures différents, avec des responsabilités et des tâches non négligeables dans divers domaines et à différents niveaux, se sont reconnues unies dans une communion véritable et profonde : dans l’acte même de sa célébration, le Synode a été un exemple de synodalité vécue. Se rencontrer, s’écouter, dialoguer et se stimuler mutuellement pour reconnaître ce que le Seigneur dit aux femmes et aux hommes de notre temps et à l’Église pèlerine qui l’habite, a été le premier et très riche visage de la synodalité. Face à un monde qui semble souvent constitué de sommes de solitudes souvent en conflit les unes avec les autres, cette communion vécue a été offerte comme la bonne nouvelle d’un amour possible dans la mesure où il s’agit d’un don accepté d’en haut et partagé dans la foi. C’est précisément cette expérience consolante de fraternité qui a rendu plus évident le caractère dramatique des conflits en cours, en commençant par celui de l’Ukraine tourmentée, jusqu’à celui qui a explosé précisément pendant les jours du Synode en Terre Sainte avec la violence sans précédent de l’attaque perpétrée par les terroristes du Hamas contre Israël. L’appel à la paix, qui a résonné une fois de plus dans les paroles du Pape François et dans la prière qu’il a présidée dans la Basilique Saint-Pierre pour invoquer le don de la paix de Dieu, a été caractérisé par le chœur des voix des participants au Synode, provenant de toutes les parties du « village global ».

Une deuxième caractéristique de l’expérience synodale me semble avoir été celle d’une grande liberté de parole : fortement encouragée par le pape François, cette liberté a été un exercice concret du rejet de ce cléricalisme autoréférentiel et obtus, qui – comme le pape l’a dit à plusieurs reprises au cours de ces années – vide la vie chrétienne de sa fraîcheur et de son authenticité et réduit l’Église à une forme extérieure, sans âme, sans vérité et sans beauté. Le travail dans les cercles, réunis autour de tables par groupes de douze, a permis un remarquable échange d’expériences et de réflexions dans la « conversation dans l’Esprit », vécue dans une franchise absolue, qui s’est traduite dans les assemblées plénières par des occasions où les voix les plus diverses ont trouvé un espace et où les expériences des femmes, des hommes, des prêtres, des laïcs, des consacrés et des consacrées ont pu s’exprimer sans hésitation et sans crainte d’être mal comprises. Si cela s’est parfois fait au prix d’une certaine répétitivité, l’aspect incomparablement positif a été que chacun s’est senti libre de raconter son histoire et d’exposer les blessures, les défis et les problèmes de sa vie avec sincérité et une profonde confiance. Cette fluidité et cette facilité de parole sont apparues à beaucoup comme un véritable don de l’Esprit, confirmant le désir de François de faire de toute l’Église un laboratoire d’humanité authentique, libre de formes et de pratiques stérilisantes, capable d’accueillir, d’accompagner et d’intégrer des personnes différentes, souvent éprouvées par des exclusions et des étiquetages paralysants.

Enfin, l’appel à vivre l’Église en sortie, si fortement souligné par le Pape, a été entendu : l’Évangile est une grâce qui pousse à communiquer aux autres la beauté du don reçu. Une Église sans passion missionnaire est un corps mort, qui tend à se replier sur lui-même jusqu’à se consumer dans l’autocélébration ou dans la peur typique d’une citadelle assiégée. La synodalité est communion, participation et mission, et là où cette dernière fait défaut, les deux autres dimensions seront également déficientes ou malades. L’Église missionnaire est oublieuse d’elle-même, non pas dans le sens où elle ne s’aime pas comme un don reçu du Seigneur, mais dans le sens où elle fait fructifier le don lui-même précisément en se dépensant pour que la beauté de l’amour divin, qui en Jésus-Christ a été offert aux hommes, parvienne à tous. La vie éternelle est une grâce à accueillir et à offrir à tous, à travers l’annonce de l’Évangile, la grâce des sacrements et l’engagement pour le soin et la protection de la création, que Dieu a confiée à l’homme comme un jardin à cultiver, dans lequel partager la richesse des dons que le Créateur a offerts à sa créature. L’appel à une éthique et à une spiritualité écologiques a mis en évidence le fait que l’Église synodale missionnaire est également appelée à agir dans le cadre de son engagement en faveur d’une écologie intégrale, qui investit toutes les dimensions de l’existence et toute la richesse des relations possibles entre les êtres humains et l’ensemble de la création. Un regard particulier a été porté sur les jeunes, auxquels l’Église sait qu’elle peut offrir le sens de la vie qui vient de la joie de l’Évangile. Loin de se refermer sur elle-même, l’Église synodale est un ferment de vie nouvelle et pleine pour tous, inspirant des pratiques engagées au service de la justice, de la paix et de la protection de l’environnement que Dieu nous a confié.